While We’re Young est un film de Noah Bumbach, qui est un peu LE réalisateur new-yorkais labellisé « film indépendant hipster qui dit pas son nom ». Bien que je ne suis pas particulièrement fan de l’imagerie hipster (notamment depuis Spike Jonze et son film instagram Her), Noah Bumbach maîtrise cet équilibre ténu qui existe entre le film indépendant US réussi et le gros cliché #Sundance.
Conscient de cette étiquette qui colle à la peau des bobos new-yorkais, c’est donc avec cet humour pince sans rire qui le caractérise que Noah Bumbach sort son 8ème long-métrage : While We’re Young. (« Pendant que nous sommes jeunes », pour toi, le français non anglophone.)
Le Pitch
Josh (Ben Stiller) et Cornelia (Naomi Watts) sont des quarantenaires new-yorkais plutôt bien dans leur vie. Lui est réalisateur de documentaires (enfin, plutôt au singulier, il est sur le même depuis 10 ans), elle est productrice. Ils sont tous les deux sans enfant et tentent de résister aux trompettes archaîques de la société dont ils se sentent exclus car n’ayant pas d’enfant (tu vois le truc ? le fameux « si t’as pas d’enfant à 40 ans, t’as raté ta vie »). Durant une conférence, Josh fait la rencontre de Jamie (Adam Driver) et sa femme Darby (Amanda Seyfried), deux hardcore hipsters dont le mode de vie fascinent Josh et Cornélia. Ils deviennent amis, et nos quarantenaires se laissent transporter dans ce tourbillon de nouveautés, faisant ressortir, forcément, un questionnement profond sur leur propre vie.

Le Hipster sauce Greenwich
Noah Bumbach est connu pour notamment 4 films : Les Berkman se séparent, Greenberg, Frances Ha et le scénario de La vie aquatique de Wes Anderson. C’est dire s’il aurait été facile de lui coller l’étiquette « réalisateur hipster » sur le dos. Cependant, ces 4 films sont, pour ma part, tous très bons (avec un gros coup de cœur pour Frances Ha). Bien au fait de cette éventuelle étiquette, Bumbach la renvoie dans le décor en prenant un malin plaisir à pousser à fond le cliché en caricaturant Jamie et Darby. Jamie et Darby se déplacent à vélo, Jamie et Darby ne cherchent pas des infos sur leur téléphone quand ils ne savent pas, ils préfèrent « savourer le fait de ne pas savoir », Jamie porte un grand chapeau de feutrine, Darby fait de la glace artisanale bio.
Jamie et Darby vivent dans un grand loft en écoutant des vinyles. A ce contraste Jamie/ Darby et Josh/ Cornélia (qui vivent, eux, dans leur temps comme vous et moi, enfin du moins comme moi), s’ajoute un troisième larron, celui du couple Marina/Fletcher, amis de Josh et Cornélia, qui eux, viennent d’avoir un enfant. Etouffés entre ces deux clichés de la société, Josh et Cornélia se débattent avec leur culpabilité et le sens de la vie, parfaitement traité, toujours à la limite du drame et de l’humour.
La crise de la quarantaine sauce Bumbach
Noah Bumbach traite avec subtilité les losers qui n’en sont pas. Je m’explique. Que ce soit dans les Berkman se séparent et le divorce jugé de l’extérieur, dans Greenberg où l’on retrouvait déjà Ben Stiller (et son potentiel dramatique) où cette fois c’était la solitude qui était jugé, ou que ce soit dans Frances Ha dans lequel Frances, elle, se sent décalée et paumée, Noah Bumbach finit par dépeindre avec vérité ces petits passages de la vie que nous connaissons tous. Ici, c’est clairement le sujet de la quarantaine qui est traité, avec douceur et raison. Enfin de compte, Noah Bumbach est un réalisateur sociologique. Plutôt amusant et inventif. Un sociologue qui ne se prend pas le chou et qui prend des personnages simples mis dans des situations simples qui peuvent parler au spectacteur. Il amène assez de recul aussi pour que les personnages et le spectacteur puisse en rire. Certes il y a quelques moments dramatiques, bien sûr, mais n’est ce pas cela qui fait le sel de la vie, me direz vous ?
Dans les films de Bumbach, les personnages galèrent. Oui. Et ils s’en prennent aussi plein la poire. C’est vrai aussi. Mais ces épreuves là leur permettent, à la fin, de trouver leur chemin. Une espèce de conte moderne, en fait. Un conte moderne sociologique.
Oui, voilà. While We’re young est un conte moderne sociologique qu’on vous conseille vivement.
Sortie en salle : le 22 juillet 2015