“Nan mais le Voyage d’Arlo, c’est plutôt pour les enfants. T’as pas la double lecture que tu peux avoir dans les autres Pixar, du coup c’est un peu chiant. Mais c’est joli !”
Comme c’est l’avis le plus répandu que j’ai entendu sur ce film et que je me remettais tout juste de la claque Vice Versa, je ne me suis pas précipitée dans les salles pour découvrir ce Pixar là (et pourtant hein, j’aime Pixar d’un amour sincère et infini, comme décrit dans cet article).
Donc j’ai attendu la semaine dernière, pépouze, d’avoir une heure et demi devant moi, et limite de faire autre chose en même temps (les ongles, en l’occurrence. Ouais.) pour découvrir ce fameux Pixar si pipou réservé aux enfants.
Cauchemar.
Attention, cet article contient des spoilers, voire raconte tout le film.
Sur une musique flippante digne des films de Christopher Nolan, une météorite se détache et au lieu de percuter la Terre et détruire tous les dinosaures (ce qui aurait donné un Pixar de 45 secondes), la frôle, laissant la porte ouverte à une dimension où les dinosaures ont survécu, et les humains, eux, sont encore à l’état d’animal. Idée sympathique, quoi que peu appréhendable pour un enfant. Bref.
Dans ce monde parallèle, les dinosaures font tout comme les humains (mais les humains de “si la météorite avait percuté la Terre”, vous suivez ?) donc ils font de l’agriculture, construisent des maisons, des pièges, et ils parlent. C’est un dessin animé, je sais. Encore une fois, idée intéressante : j’adhère.
Une fois les dix premières minutes passées, Arlo va devenir à mes yeux pire que la franchise Saw mélangée au psycho-drame de n’importe quel film de Ken Loach.

Déjà, Arlo, c’est le plus chétif et craintif de toute sa famille. Tellement que son frère il arrête pas de se moquer de lui et que sa mère est au désespoir. Alors son père a une idée piquée à Mufasa : il va le faire courir dans un grand champ tout noir pas éclairé. Nan mais pas besoin d’appeler la DASS, c’est pour lui montrer que derrière quelque chose qui peut faire peur au premier abord, il peut y avoir en fait quelque chose de cool. Notez ça dans un coin de nappe, on en a besoin pour plus tard, de cette belle leçon. Donc ils rigolent, ahah, resserrent les liens père-fils en batifolant avec leurs grosses papattes provoquant un génocide de lucioles MAIS l’orage arrive. Donc il faut vite rentrer, mais Arlo est pas assez rapide et un peu effrayé (vu qu’il est petit) et donc, son papa l’engueule et Arlo se ramasse savamment la tronche avec une belle écorchure. Karma a vu tout ça alors qu’est ce qu’il fait ? Il tue le père ! Et oui ! BIM, t’avais qu’à aller plus vite, Arlo, non mais qui m’a fichu un dinosaure aussi lourdaud.
Emporté par le courant, notre héros se retrouve vachement loin de chez lui, désorienté, avec des bleus partout et des entorses aux pattes. Il essaie de ramper comme il peut, ce qui franchement, m’a fait mal au coeur. C’est là que j’ai commencé à entrevoir le potentiel “affreux” de ce film “pour enfants” (pour enfants nés au Moyen-Âge alors, quand c’était à la dure). Et là, il recroise un enfant humain, tout petit, un “sauvage” comme on dit. Un enfant qu’il avait capturé et que son père lui avait demandé d’achever AU GOURDIN. Oui, au gourdin. Mais comme on est pas chez Tarantino, Peter Sohn nous a épargné cette scène (ou le film aurait duré 30 minutes. Running gag.) Donc après une séquence en mode “reverse croc-blanc”, les deux deviennent potes et Arlo l’appelle “Spot” (qui, rappelons le, veut dire “tâche”. Sympa pour ce pouilleux d’enfant !).
Donc ils sont potes mais peuvent pas communiquer par le langage alors ils vont mimer et dessiner. Ce qui donne une scène complètement triste où chacun montre à l’autre les membres de leur famille qui sont morts ! Ahahah trop mi-gnon, qu’est ce qu’on se marre chez Pixar ! Pas le temps de s’en remettre qu’une tempête fait rage, manquant de les tuer. Heureusement des gentils ptérodactyls vont les aider. Vous vous souvenez la leçon “faut pas avoir peur de ce qui peut sembler effrayant” ? Ben Arlo l’applique alors il papote avec eux, et en fait, ils sont pas du tout sympas. En fait, ce sont des gros charognards qui sont dans une secte dans laquelle ils vénèrent “la Tempête”, et dans laquelle ils essaient d’embrigader notre duo, en mode scientologie ! Et ouais, Papa avait tort ! Super leçon donc.

Bon, ils sont sauvés par des T-Rex super balèzes, une famille, dont l’histoire a été écrite par Emile Zola tellement ils leur aient arrivé que des embrouilles. Leur troupeau a été volé par des vilains, alors quand ils le retrouvent, il décide d’utiliser un appât : Arlo ! Ben oui, quoi de mieux qu’utiliser un bébé dinosaure innocent pour attirer des vilains dans la plaine ? Puis les T-Rex attendent un petit moment avant d’aller les chercher, hein. Mais après leur avoir défoncé la gueule, ils récupèrent leur troupeau. Donc ils vont pouvoir manger, c’est cool.
Toute la smala (famille de T-Rex, Arlo, Spot et une centaine de bisons) court à travers champ, jusqu’à apercevoir un chemin qui peut ramener Arlo chez lui. Après leur avoir filé un coup de main en mode “faisons travailler un enfant comme berger de fortune”, Arlo et Spot quittent le troupeau, à l’arrache, sans que les T-Rex s’arrêtent dire au revoir, faudrait pas abuser, ils ont du boulot EUX. Arlo et Spot retrouvent la rivière, tout heureux, ils batifolent dans les nuages, seul moment de répit dans ce parcours cauchemardesque. Répit de courte durée car v’là t’y pas le retour de nos ptérodactyls scientologues, qui ont bien envie de bouffer le petit Spot. Et comme ça suffit pas, v’là t’y pas le retour de la Tempête, qui provoque un glissement de terrain de ouf, emmenant nos héros dans la rivière, où ils nagent péniblement au milieu du courant et des troncs d’arbres. Et de la terre. Et des cailloux. Oh mais j’oublie : au milieu de ça, il y a une scène sous LSD où Arlo est empêtré dans des lianes, et après avoir été assommé par une pierre, il voit son père, alors il se dit « Chouette, tu es vivant ! », alors que pas du tout, c’est une hallu. Super triste.
Donc revenons à notre noyade de l’apocalypse. Après tout ça, Arlo a réussi à choper le corps sans vie de Spot et on passe de longues minutes à croire que cet enfant de 2 ans est peut-être mort. Ce qui m’aurait pas étonné vu la teneur dramatique du film. Mais non, Arlo lui souffle dessus et faut croire que son haleine de diplo ramène Spot à la vie. Tout contents, ils continuent leur route pépouze. Juste avant d’arriver chez Arlo, ils croisent une meute d’humains (ils l’avaient déjà croisé mais Arlo voulait pas que Spot aille les voir,prétextant qu’ils avaient “de la route”. Je rappelle que Spot a 2 ans et est orphelin. Sympa le pote.). Cette fois, Spot va les voir et c’est donc une famille d’humains, toute sale et mal peignée. Mais ils adoptent tout de suite Spot, alors après avoir survécu à la Tempête, aux ptérodactyls et au gourdin, Spot part avec sa nouvelle famille et laisse Arlo tout seul. Et ils s’échangent même pas les numéros, rien. 3 mètres plus loin, Arlo retrouve sa mère complètement épuisée par le boulot et le reste de sa famille, et gagne enfin sa place de petit courageux. Ils auraient pu vivre tous ensemble, hein, la famille Dinosaures et la meute d’humains. Mais non.
FIN
(de ce film qui, sous couvert d’être mignon, est en fait cauchemardesque)

Aaaaah ! Moi j’ai adoré ce Pixar ! Plus que « Vice-Versa » au passage.
Pour moi, c’est un film qui pose la question de l’identité de l’enfant par rapport à la famille : quelle est à sa place, est-ce qu’il doit absolument rentrer dans la case que son père lui impose ?
C’est un message assez bien trouvé, malgré le fait que le scénario soit simpliste.
En fait, cet article n’est pas une critique du film mais un article plutôt cynique quant au film qu’on a vite rangé dans la catégorie « Film pour enfants », hors il se passe tout un tas de choses affreuses, on y parle du rapport à la famille mais aussi beaucoup de la mort, de l’inconnu et d’autres sujets somme toute assez sombres par rapport aux Pixar habituels. C’est ce décalage qui m’a fait réagir et écrire ce billet assez…particulier !