Après Incendies (que je n’ai toujours pas vu à l’heure où j’écris ces lignes) et les excellents films que sont Enemy & Prisoners, Denis Villeneuve revient avec un thriller d’action burné mais pas que. Mais du coup, son premier film en sélection officielle à Cannes est-il une réussite ?
L’atout majeur de Sicario réside dans son esthétique qui, comme sur les précédents longs du réal, est très travaillée. Villeneuve est un réalisateur brillant qui maîtrise parfaitement les mouvements de caméra, les cadrages et la composition des plans, maîtrise qui se ressent dans un grand nombre de scènes oppressantes, stressantes et/ou impressionnantes. La photographie de Roger Deakins est sublime (la dominante jaunâtre, l’éclairage….) et vient renforcer l’ambiance pesante des séquences. Tous ces éléments créent des scènes mythiques telles que le passage à la frontière (oppressant puis brutal), l’assaut qui sert d’ouverture (à couper le souffle), les plans en drone au dessus de la frontière… Et comme si la forme n’était pas déjà fabuleuse, la bande originale de Jòhann Jòhannsson et le travail sonore de William Sarokin viennent rendre le tout encore plus immersif.
Le casting composé pour le film fonctionne bien : les acteurs sont très bons (Del Toro en tête) et correspondent plutôt bien à leurs personnages. Seulement, le soucis est là, les personnages ne sont pas vraiment développés; il y a bien un léger background, mais c’est du déjà vu et on perce rapidement les secrets de certains pro/antagonistes. Et comme si ça ne suffisait, l’intrigue contient des séquences assez téléphonées, voir inutiles (les petites scènes d’une famille mexicaine qui au final ne servent pas à grand chose). La réflexion sur les méthodes de la traque des cartels gagnerait à être plus développée puisqu’elle n’est que survolée si l’on prend en considération la richesse de ce thème. Cela dit, même si le scénario n’est pas vraiment super original dans sa construction, le film reste assez plaisant à suivre.
Si vous cherchez un divertissement d’action haut de gamme, prenant et qui n’a pas recourt à des facilités de forme, alors n’hésitez pas à passer la frontière mexicaine avec l’équipe de Brolin. Si vous voulez un scénario posant une vraie réflexion sur la traque des cartels, faites demi-tour.