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Note de la rédaction :

Note de la rédaction :

Benoît Delépine et Gustave Kervern en sont déjà à leur septième long-métrage, que de chemin parcouru depuis Aaltra ! Saint-Amour est peut-être légèrement moins poétique que leurs films précédents, mais nous offre une nouvelle fois la possibilité de sortir des sentiers battus habituels. Critique.

Résumé :

Tous les ans, Bruno (Benoît Poelvoorde, excellent) fait la route des vins… sans quitter le salon de l’Agriculture ! Mais cette année, son père, Jean (Gérard Depardieu, moins show-off qu’à son habitude), venu y présenter son taureau champion Nabuchodonosor, décide sur un coup de tête de l’emmener faire une vraie route des vins afin de se rapprocher de lui. Et s’ils trinquent au Saint-Amour, ils trinqueront bien vite aussi à l’amour tout court en compagnie de Mike (Vincent Lacoste, toujours excellent), le jeune chauffeur de taxi embarqué à l’improviste dans cette tournée à hauts risques entre belles cuvées et toutes les femmes rencontrées au cours de leur périple…

Saint-Amour-film

Le duo Benoît Delépine et Gustave Kervern nous propose une nouvelle fois un road-movie hexagonal. Contrairement à ce que vous pouvez imaginer, le film n’a pas pour objet d’offrir un écrin idéal pour que notre duo de choc n’en fasse qu’à sa tête. Bien au contraire : le film tourne moins autour du plaisir de s’enivrer et des « petites contrariétés » qui en découlent, que d’une belle et simple histoire de famille. Jean a arrêté de boire de l’alcool à la naissance de son fils unique Bruno. Il aimerait lui confier les clés de sa ferme, mais il constate avec un brin de tristesse que celui-ci préfère les beuveries. Reconnaissons que la vie ascétique qui semble l’attendre n’a pas de quoi le faire rêver.

En somme, sur l’échelle des films traitant de l’alcool, on est aussi loin de Leaving Las Vegas de Mike Figgis, ici point de pathos, que de La part des anges de Ken Loach, il n’est jamais question de magnifier le plaisir de l’alcool. Au contraire, l’alcool a plus vocation à servir d’antidote à la déprime ou de vecteur de débauche, que de plaisir d’esthètes. En résumé, ici ne vous attendez pas à voir de belles envolées lyriques sur la subtilité d’un grand cru : si nos compères boivent, par inadvertance et un brin de hasard, des grands crus, c’est pour mieux les écluser cul-sec avec grossièreté et un brin de panache.

S’il fallait faire une analogie avec un film sur l’alcool, on citerait volontiers Un Singe en hiver d’Henri Verneuil, moins pour sa poésie du quotidien que pour le rapprochement de deux générations d’écorchés vifs se retrouvant autour de l’alcool. Autre point commun : la confrontation de deux acteurs colossaux au sommet de leur art  : Jean Gabin et Jean-Paul Belmondo d’un côté et Benoît Poelvoorde et Gérard Depardieu de l’autre. Tout comme Gabin à son époque, Gérard Depardieu ne tire pas la couverture à lui et parvient presque à nous tirer la larme vers le milieu du film lors d’une révélation qui aura des conséquences énormes dans le rapprochement des deux hommes.

Sur le plan de la mise en scène, Saint-Amour ne propose rien de réellement neuf, ce qui est en soit une première pour le duo de cinéastes, cependant cela nous convient pleinement tant le fond et la forme fonctionnent au diapason de cette histoire modeste, mais à la sincérité réellement touchante. Benoît Delépine et Gustave Kervern ne cherchent pas à éblouir, ni à choquer le bourgeois (hormis dans quelques scènes ceci dit hilarantes), mais font une première incursion réussie, nous semble-t-il, dans le monde de la comédie dramatique à la française avec une bonne dose d’excentricité salutaire.

En parlant d’excentricité salutaire, si les nombreux caméos ne nous ont pas tous convaincus, comment ne pas évoquer l’intervention lunaire de Michel Houellebecq ? Son génie comique pince-sans-rire, déjà omniprésent dans son écriture, s’avère encore plus impressionnant dans son jeu d’acteur : tant son physique improbable et son regard proche du coma nous ont impressionnés et ont finis de nous convaincre qu’il y avait de la vie en dehors des sentiers (re)battus du cinéma français.

Mention spéciale à la musique composée par Sébastien Tellier, dont les nappes orchestrales et pop égayent avec un brin de douceur cette balade en territoire décalé.

En résumé, Saint-Amour est loin d’être aussi radical et dérangeant que les autres films du duo, mais sa fraîcheur et son sens du rythme, parfois en décalage avec nos attentes, en font, une nouvelle fois, un objet filmique non-identifié hautement recommandable.

15
note globale

Fiche technique :

Réalisation et scénario : Benoît Delépine et Gustave Kervern
Acteurs : Gérard Depardieu, Benoît Poelvoorde, Vincent Lacoste , Céline Sallette
Photographie : Hugues Poulain
Musique : Sébastien Tellier
Son : Guillaume Le Bras
Producteurs : Jean-Pierre Guérin, Benoît Delépine et Gustave Kervern, co-producteur Gérard Depardieu
Sociétés de production : JPG Films, No Money Productions, Nexus Factory, Umedia, DD Productions, avec la participation de Canal + et France 2
Société de distribution : Le Pacte
Date de sortie : 2 mars 2016
Noodles

Fan de cinéma depuis longtemps, je partage mes opinions avec vous. N'hésitez pas à me donner votre avis sur mes critiques. Sur Twitter je suis Noodles, celui qui tombe systématiquement dans le piège des débats relous.

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