Traditionnellement, la programmation du PIFFF laisse l’opportunité aux spectateurs de découvrir ou redécouvrir en salle des pierres angulaires du cinéma fantastique dans des copies aux qualités techniques époustouflantes.
Ces séances cultes ont fait cohabiter cette année deux auteurs majeurs du cinéma fantastique : John Carpenter (faut-il encore énumérer sa filmo ?) et Clive Barker (le génialisime créateur de Hellraiser et The Book of Blood).
L’occasion était toute choisie pour vous parler de ces deux long métrages atypiques ayant éclos à des moments difficiles de la carrière de leurs auteurs.
Big Trouble in Little China (Jack Burton dans les Griffes du Mandarin) / John Carpenter / 1986
Malgré l’échec financier de The Thing (1982) qui le minera moralement lors de la réalisation de Christine (1983) et Starman (1984), John Carpenter se voyait toujours confier des budgets conséquents à Hollywood.
C’est en 1985, après la signature d’un deal avec la Fox que Carpenter s’attelle au développement de Big Trouble in Little China. Ecrit par Gary Goldman et David Z. Weinstein, Carpenter modifie le contexte du script. L’arrivée du cinéma d’arts martiaux grâce au marché vidéo incite Carpenter à déplacer l’univers, initialement prévu au Far-West, en plein Chinatown. Ecrit avec l’appui du réalisateur/scénariste W.D Ritcher – auteur du complètement barré Buckaroo Banzai à travers la 8ème dimension – tout était prêt pour faire de Big Trouble… un grand divertissement. Casting, réalisation, effets spéciaux. Toute les planètes étaient alignées.
Mais comme toujours avec Carpenter, c’est bien après sa sortie que le film fut reconnu à sa juste valeur.
Chaque revisionnage de Big Trouble lève le voile sur un aspect insoupçonné jusqu’alors. Scénario, montage, humour, le film est clairement en avance sur son temps. Notamment dans la relation qu’il noue avec son spectateur.
Le plus troublant réside en effet dans l’audace avec laquelle le scénario transgresse les archétypes des personnages. Big John a toujours été un cinéaste offrant un point de vue travaillé dans chacun de ses films. La séquence inaugurale d’Halloween, la découverte des envahisseurs de They Live, la traque du chien de The Thing. Il place notre regard dans une direction nouvelle. Et c’est évidemment le cas avec Big Trouble…
…qui place sa narration du côté du sidekick. En effet, malgré ce que laisse entendre le titre français, Jack Burton n’est pas le héros. Sa morale n’évolue pas entre le début et la fin du film. Il se retrouve contre son gré dans l’aventure. Motivé par le seul objectif de retrouver son camion, Burton va pourtant sauver Chinatown.
Il n’a rien de l’anti-héros. Mais, bien qu’il ait un comportement rustre et n’hésite pas à faire usage de la violence, Burton est plutôt un chanceux. Et c’est bien là sa plus grand force.
Pour toutes ces richesses thématiques et visuelles, Big Trouble est un film à ne pas sous estimer. Une séance du film constitue une véritable récréation pour tous les initiés du cinéma de Carpenter et plus globalement du cinéma de genre. Sa ressortie à partir du 31 Janvier dans une version 4K flambant neuve est une occasion à ne manquer sous aucun prétexte.
Lord of Illusion / Clive Barker / 1990
Judicieusement, c’est un autre film manipulant les codes et archétypes qui s’est retrouvé dans la sélection Séance Culte.
Surtout connu pour avoir créer l’univers d’Hellraiser, peuplés de cénobites option tout cuir et de leurs rubick’s cubes démoniaques, Clive Barker a œuvré sur une grande quantité de supports.
Romancier, réalisateur, scénariste, peintre, le génie de Barker s’étend dans une galaxie d’œuvres trans-médias.
En 1995, Barker réalise Lord of Illusion. Un long-métrage basé sur une nouvelle présente dans le sixième volume de Book of Blood. Son anthologie de nouvelles horrifiques initiée en 1984 qui servira également de terreau à Candyman, Rawhead Rex ou bien Midnight Meat Train.
Expérimentation subversive des mythologies, il signe avec Lord Of Illusion une surprenante combinaison de différents sous genres. Érudit, Barker fait voguer un banal slasher en plein territoire redneck vers des horizons plus ésotériques.
Harry d’Amour, un détective privé ayant eu plusieurs rencontres avec le paranormal débarque à Los Angeles pour une enquête. Très tôt aux prises avec des événements surnaturels, il remontera la piste d’un culte apocalyptique. Ce dernier prépare le retour de leur gourou : le Maitre des Illusions.
Avec un tel synopsis, pas le temps de s’ennuyer. Les retournements de situations sont nombreux et la construction est plutôt solide. Barker maîtrise son montage parallèle et le film ne s’essouffle aucunement.
Concernant la direction artistique, le film ouvre la porte à un monde cauchemardesque. Il emprunte par exemple à la mythologie égyptienne son architecture mystique. Le temple du bad guy est un immense labyrinthe ensablé affichant hiéroglyphes et alphabets sur ses parois. On retrouve aussi des pastiches et clins d’œil à Houdini et autres prestidigitateurs en résidence à Vegas.
L’auteur anglais fait également intervenir des figures inattendues pour créer une ambiance unique. On y trouve par exemple des éléments de la préhistoire du cinéma (Méliès et les Frères Lumières) mais aussi des montres des années 50-60. Pour en conclusion, proposer un panel large sur les illusionnistes, en quelque sorte sa manière de rendre hommage au cinéma et sa capacité à créer des univers parallèles.
Malgré ces citations, le film est un pur produit de son époque. Les CGI, heureusement peu nombreux, nous rappellent les glorieuses heures de la Playstation et ses textures approximatives. Il en est de même pour la lumière, qui laisse planer une ambiance Hollywood Night.
Inédit jusqu’au PIFFF dans nos salles, le film était présenté dans sa version director’s cut. C’est cette version qui sera présente en 2018 sur le Blu-Ray du film édité par Le Chat qui Fume.
L’éditeur avait également amené la copie neuve du foutraquement fun 36 15 Code Père Noël. Le film bénéficie d’une excellente photographie et de brillants comédiens. Il est a découvrir immédiatement en combo DVD/Blu Ray.