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Manchester by the sea VS Moonlight – Le duel des Oscars 2017

By 6 mars 2017mars 10th, 2017Critiques
Note de la rédaction :

La Grand-messe des Oscars 2017 est passée, et après un rebondissement vaudevillien et un beau moment de malaise offert par Warren Beatty, « Moonlight » de Barry Jenkins a raflé la statuette tant convoité du Meilleur Film. Côté acteur, Casey Affleck, frère de, voit enfin son talent reconnu en remportant l’oscar du meilleur acteur pour « Manchester by the sea« de Kenneth Lonergan.

Deux films qui semblent montrer deux visions de l’Amérique opposées, et qui ne sont pourtant pas si différents.

Critique comparative.

Black or White

Que ce soit dans « Manchester by the sea » ou « Moonlight », les films sont très divisés. Aucun noir dans l’un, aucun blanc dans l’autre. Famille middle class banlieusarde côté blanc, trafic de drogue dans le ghetto côté noir. Tous les clichés des films américains, et aussi de leur société sont là, bien présents, histoire de nous montrer que l’Amérique, si ce n’est dans les urnes, et aussi bien divisée à l’écran. Cependant, malgré ce clivage somme toute assez attendue, les deux films se rejoignent et se ressemblent sur plusieurs points.

Un même gout pour la musique classique

Dans les deux films, on retrouve une utilisation de morceaux de musique classique. Hasard ou coïncidence, cette utilisation sert à emphaser un décalage entre ce qu’on voit et ce qu’on entend, en rajoutant au passage un soupçon de pathos. J’insiste sur « soupçon », car si ces deux films peuvent émouvoir, ils arrivent à toucher la corde sensible juste ce qu’il faut, sans que cela soit trop non plus.

Une passion commune pour les cylindrées

Dans « Manchester by the sea » comme dans « Moonlight », beaucoup de problèmes se règlent en voiture. Que ce soit entre Lee et Patrick, ou Little et Juan , la figure paternelle absente prend place à l’avant des voitures. On y apprend à s’apprivoiser, souvent malgré soi et malgré l’autre, deux mecs se retrouvant dans une situation qu’ils n’avaient pas demandé mais qui décident de faire avec.

Les femmes au second plan

« Manchester by the sea » et « Moonlight » sont principalement des films masculins. Bien qu’on retrouve des seconds rôles féminins intéressants, les projecteurs sont braqués sur le mal-être des sentiments éprouvés par des protagonistes avant tout masculins. Mères addicts dans les deux films ou ex en quête de rédemption, chaque femme a droit à 10 minutes à l’écran. Coup de coeur pour la magnifique Janelle Monae dans « Moonlight », qui crève l’écran en 3 minutes chrono. Mais qui contrairement à ses collègues Naomie Harris et Michelle Williams, n’a pas eu droit à sa nomination.

Une longueur certaine et une ode au pessimisme

Loin de moi l’idée de créer un scandale, mais les deux films partagent un attrait certain pour la longueur. Que ce soit « Manchester by the sea » (2h17) ou « Moonlight » (1h50), c’est très plan-plan. Un manque de rythme, pas totalement inutile, mais soporifique. « Ah ben c’est pas parce que ça explose pas de partout que c’est nul hein! ». Je sais bien, mais il doit bien y avoir un juste milieu. D’autant que cette lenteur peut être considérer comme une douce torture quand on voit le mal que les personnages principaux ont à lutter contre eux-même à chaque plan, sans le moindre espoir d’amélioration pour Lee, et une petite lueur tout de même pour Black.

La mer

Dans les deux films, la mer joue un rôle centrale. Elle ravive des souvenirs et elle apprend à faire grandir.

Manchester by the sea – la critique

Lee apprend la mort de son frère et aussi qu’il a la garde de son neveu, Patrick. Concierge à Boston, Lee n’est pas vraiment un bout-en-train depuis que la vie lui a joué un sale tour dont il ne se remettra jamais. L’air perdu de l’homme qui n’a plus une seule étincelle, il doit retourner dans sa ville natale de Manchester-by-the-sea où son passé l’attend patiemment pour en rajouter une couche.

Manchester-by-the sea est un film très émouvant. Suivre le chemin pénible de Lee, parfaitement interprété par Casey Affleck, n’est pas sans heurt pour qui n’est pas mort à l’intérieur. L’histoire d’un homme qui est là sans vraiment être là, qui a perdu l’envie d’essayer, plus mort-vivant que bien présent. Bien que Kenneth Lonergan essaie de nous faire croire qu’il peut y avoir une issue, c’est un leurre. Lee n’aura pas d’échappatoire. Sans frère, sans famille, il n’arrive à se sentir vivre qu’à travers des bagarres dans les bars, de brefs moments où la colère l’emporte sur sa neurasthénie, anesthésiée par l’alcool, et fugace. Mise à part sa longueur, le film se tient tout de même très bien, et il n’y a rien à redire sur l’interprétation, la musique, la photo..un film calibré au poil de cul pour l’Académie des Oscars. On y dénonce rien, on n’y trouve pas de solution, on observe, bien peinards dans nos fauteuils, la vague lutte sans victoire possible d’un mec dont la culpabilité et la vie a éteint toute flamme.

Note // 14

Moonlight – la critique

Enfant, puis ado, puis adulte, on suit la quête d’identité de Little, Chiron, puis Black: 3 étapes, une seule vie. Plutôt la quête d’une identité sexuelle pour être précise, dans un monde où il ne fait pas bon être gay. En plus d’être noir, pauvre, et avec une mère droguée. Bref, tous les clichés du film ghetto sont réunis.

Cependant, avec distance et pudeur, Barry Jenkins arrive à ne pas en faire trop. Tout comme « Manchester by the sea », « Moonlight » souffre d’une certaine lenteur, inhérente aux films oscarisables, afin de ne pas brusquer de quelques manières que ce soit le votant. Bien qu’étant assez poétique, « Moonlight » peut décevoir par son manque certain de prise de position. Quant au choix politique de sa victoire, on peut se poser la question si les votants n’avaient pas en tête un pied-de-nez à Donald Trump en faisant gagner un film à des années-lumière de sa politique rétrograde, ou rattraper la mauvaise réputation des Oscars à être trop blancs comme c’était le cas l’année dernière. Que ce soit le cas ou non, « Moonlight » a gagné, ce qui lui confère un rayonnement visuel plus large et une place au Panthéon des Meilleurs Films. Et si nous vivons dans une époque où un film sur un homme noir, pauvre et gay est encore un choix politique, que des films comme « Moonlight » soient vus et revus, enseignés, abordés depuis le plus jeune âge. Si « Moonlight » reste, comme « Manchester by the sea » un film au calibre parfait pour un Oscar dans lequel rien ne dépasse, il n’en reste pas moins d’utilité publique.

Note // 13

Dory

Passionnée de cinéma en général, et de cinéma anglophone en particulier, je fais mes premiers pas critiques sur mon tumblr Vacances de pauvres. Fan de Star wars, Marvel et autres blockbusters (mais pas que), j'ai rejoint l'équipe Doc Ciné pour vous faire partager mes envies et mes avis, tout simplement.

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