Love est un long-métrage de Gaspar Noé qui a fait polémique au Festival de Cannes pour ses scènes de sexes explicites et pour le moins non-simulées, le tout en 3D… Mais est-ce suffisant pour le ranger dans le lot des films aussi inutiles que racoleurs ? Critique.
Jeune père de famille, Murphy reçoit un matin un appel de la mère de son ancienne compagne, qu’il n’a plus vue depuis deux ans, et se remémore l’intense histoire d’amour vécue avec elle.
Dans un film radical, très personnel et au projet déjà ancien, dont l’échec d’un premier tournage a donné lieu à Irréversible, Gaspar Noé mêle, avec une apparente contradiction, scènes de sexe très crues et vision romantique de l’amour, au bénéfice de laquelle il utilise une forme splendide.
Visuellement, Love est en effet magnifique. Gaspar Noé tire très intelligemment profit de la 3D, accentuant les effets de profondeur en disposant des objets ou personnages isolés à différents plans, jouant des lignes de fuite, surlignées par des travellings arrière, et en utilisant la lumière, tantôt instrument de cette 3D, par la mise en avant des perspectives, tantôt bénéficiaire de son effet de flou qui renforce le caractère tamisé de certaines scènes, à l’image de celle où Murphy tambourine à la porte d’Electra.

Cette forme somptueuse, Noé la place au service d’une vision de l’amour très romantique, presque naïve si elle ne s’exprimait à travers la passion, dévorante et parfois destructrice, des personnages. S’il peut sembler y avoir une contradiction entre cette perspective et le recours à des scènes de sexe non simulées, celle-ci n’est qu’apparente. Car bien que le sexe y soit figuré de manière très crue, Love, qui entend montrer ce sentiment dans toutes ses dimensions, est un véritable film d’amour, y compris dans sa représentation du sexe, jamais pornographique et qui ne vise pas à l’érotisme, la sensualité du film ne s’exprimant pas nécessairement dans ces moments et le sexe sans amour apparaissant à l’inverse presque sordide.
La passion qui anime le film se traduit d’ailleurs dans sa narration, non linéaire et qui préfère épouser les élans de la relation des personnages principaux. Bien qu’ainsi très séquencée, elle n’en reste pas moins fluide, malgré une fin comportant quelques longueurs et le recours à un artifice dispensable.
C’est ce regard et cette audace qui font de Love une œuvre très personnelle, chose que ne manque pas de souligner Gaspar Noé en faisant jouer son producteur ou en prêtant ses traits à un personnage et son nom à plusieurs. Il entretient d’ailleurs un certain mimétisme avec Murphy, dont la situation, celle d’étudiant en cinéma à l’étranger, et l’ambition, dans son objet, rejoignent celles du réalisateur.