Les livres d’histoires nous apprennent que la patrie au drapeau étoilé a constamment tenu la pôle position lors de la course à l’espace. Mais il existe une époque que les trop fières yankees ont souhaité oublier. Celle où les soviétiques avaient une forte avance sur leurs rivaux libéraux. La raison d’un tel échec étaient simple. Au sein d’un même pays certaines personnes étaient contraintes de baisser la tête tandis que le reste de la population levait les yeux vers le cosmos.
Évidemment, Les Figures de l’Ombre met en avant celles obligées de baisser la tête. Catherine, Dorothy et Mary sont afro-américaines et travaillent à la NASA. Reléguées dans un bâtiment vétuste, éloignés du cœur du camp de fait d’être des femmes et d’être noirs. Cependant, elles possèdent des capacités supérieurs à la majorité des ingénieurs et calculateurs. En particulier Catherine que nous apprenons être surdouée lors du prologue. Un flashback fort, où la photographie et la mise en scène sont très inspirées.
Tout le contraire du reste du film, qui semble avoir aseptisé. La mise en scène est très académique. Le rythme du champ contre-champ est défini à partir le début et la fin des dialogues des comédiens tandis que les décors nous sont montrés avec des plans d’ensemble normaux, sans surprise.
Le film insère de nombreux repères chronologiques dans sa mise en scène. Coupures de journaux, extraits d’émissions radio et évidemment des passages télévisés. Le film en intègre notamment lors de « montage » qui font avancer l’intrigue dans le temps. Cependant, la direction choisie pour ces ajouts est curieuse. Un patchwork d’images incompatibles. Archives en noir et blanc, archives colorisées et rushs du films «vieilles » pour l’occasion.
Si la mise en scène baigne dans le commun, le film s’en tire par son élégante photographie. Tout les matières et les textures respirent à l’image. La lumière n’est jamais simpliste. Les ombres notamment sont travaillés avec beaucoup de soin. Cette intention sert avec pertinence le propos du film. L’hypocrisie de la ségrégation est montrée grâce une opposition de style de lumière. En effet, la partie blanche de la NASA est grandiose et théâtrale tandis que la partie réservée aux personnes colorés est austère.
Peu atypique dans sa réalisation, le film se distingue en majorité par une écriture savoureuse. Les personnages principaux en premier lieu. Toutes ont leur caractère et leur propre trait d’humour. Chacune a sa place dans l’histoire et se complète parfaitement. Un trio parfaitement équilibré où leur émancipation occupe un acte du script. D’ailleurs, l’écriture volontairement cynique parvient à rattraper des maladresses d’écritures. Le film ajoute en effet une sous intrigue amoureuse inutile qui inflige au long-métrage des longueurs. Aussi, l’écriture permet d’aborder plusieurs inégalités avec une grande justesse. Jamais donneur de leçon ou à s’apitoyer sur ses personnages, le script glisse juste les faits sous nos yeux.
Pour rendre corps à ce texte, le film bénéficie d’un casting 5 étoiles. L’alchimie fonctionne à merveille entre nos héroïnes. Elles paraissent toutes complètements investis dans leur rôle et leur énergie déborde de l’écran. Pour ce qui est des rôles secondaires, tous parviennent à être crédible et attachant. Mention spéciale à Kevin Costner qui conserve son cabotinage d’antan.
Malgré sa mise en scène académique, Les Figures de l’Ombre garde le cap grâce à une écriture mordante. Servit par un casting en adéquation avec le script, on prend plaisir à suivre l’évolution de ces personnes sans qui la conquête spatiale n’aurait pas eu lieu.