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Note de la rédaction :

Tsui Hark nous refait le coup du film historique avec La Bataille de la Montagne du Tigre un film d’action en hommage aux héros oubliés d’une période de l’histoire de Chine que l’on connaît mal : la seconde Guerre civile qui débute en 1945. Critique du film.

Un Tsui Hark relativement « sobre »

On s’entend, quand on dit qu’un film de Tsui Hark est « sobre », cela veut dire qu’il est juste un peu moins barré que ses autres films : un montage moins épileptique, des mouvements de caméra presque normaux et des cadrages relativement classiques… dans une grande partie du film. Pour le reste, ça envoie bien entendu du lourd. Je pense à cette séquence qui donne son nom au film où un tigre attaque le personnage principal, c’est juste à couper le souffle.

Le réalisateur de Il était une fois en Chine, de The Blade et de Time & Tide, nous prouve, s’il était encore utile de le faire, qu’il maîtrise mieux que quiconque tous les aspects techniques d’une réalisation de haut vol. Une fois n’est pas coutume, la 3D est enfin utile dans un film d’action ! La scène du tigre et celle de la bataille dans la neige sont juste incroyables. J’ai également noté une scène mythique où on découvre la forteresse des bandits à travers les yeux des aigles du chef du clan : encore une fois, le réalisateur parvient à allier des effets magistraux sur le plan visuel et très utiles sur le plan narratif.

Par ailleurs, je précise que la relative sobriété du film inclus : une course poursuite dans la neige sur des skis en bois, une bataille dans un village longue de 15 min, un combat avec un tigre dans des arbres, une bataille dans une forteresse digne d’un manga perchée sur un  flanc de montagne et même un combat à main nues sur un avion roulant à toute vitesse avant un décollage et finissant dans un ravin…

Il était une fois en Chine

Son histoire, Tsui Hark la connaît bien et nous la fait partager depuis ses débuts au cinéma : de Zu, les guerriers de la montagne magique (1980), en passant par la saga des Il était une fois en Chine, contant la vie romancée du célèbre médecin et maître des arts martiaux Wong Fei-hung.

Dans ce film, Tsui Hark propose une adaptation, qui s’avérera très personnelle, d’un opéra lui-même tiré d’un roman intitulé Tracks in the Snowy Forest publié en 1957 et inspiré de faits réels.

La Bataille de la Montagne du Tigre montre la lutte entre une unité de l’Armée de Libération et des gangs de bandits dont l’un est dirigé par le redouté Hawk, joué par un Tony Leung Ka-Fai (notamment connu pour L’Amant de J.J. AnnaudLes Cendres du temps de Wong Kar wai , Election de Johnnie To et bien sûr Détective Dee  de Tsui Hark) méconnaissable dans son rôle de chef de gang vieilli et domptant les aigles (ça change des raptors). Face à ce personnage charismatique et presque cartoonesque se dresse l’énigmatique Yang (remarquable Zhang Hanyu), dont on ne sait pas grand chose – ni d’où il sort, ni même pourquoi il se rallie à la cause de l’Armée. Ce personnage ingénieux, voire même malicieux, s’infiltre chez les bandits pour essayer de trouver une faille dans leur organisation.

Ce film pourrait être problématique car il reconstitue un épisode cher à l’idéologie du Partie et ayant contribué à forger une histoire moderne chinoise idéalisée. En effet, cet épisode historique avait inspiré un roman patriotique, puis un « opéra révolutionnaire » sous Mao. Mais, Tsui Hark le reconstitue et se l’approprie pour en faire au final un spectacle visuel hors du commun, remake explosif des « films de commandos » (Quand les aigles attaquent, De l’or pour les braves) que produisait Hollywood à la fin des années 1960.

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Énergie de la fantaisie

Pourtant, il y a tout pour faire peur et se dire que notre très cher Tsui Hark a succombé à l’appel de Beijin et de l’argent facile comme Zhang Yimou en son temps : musique patriotique, réalisation sobre quand il filme l’armée officielle, contrastant avec la folie de la réalisation dans la forteresse ennemie, un commandant et son équipe relativement lisses…

Mais, Tsui Hark finit par dépasser la simple hagiographie pour court-circuiter le discours patriotique propagandiste qu’il semblait mener jusqu’alors. Comment ? Justement en mettant à l’écart cette armée officielle qui n’a servi qu’à planter le décor. Le véritable héros du film est Yang, ce personnage décalé, marginal et un peu freak dont on ne sait pas grand chose. Yang n’est pas un héros officiel, c’est le seul à ne pas porter d’uniforme. Il se fait passer pour un bandit et, pendant toute la deuxième partie du film, il le fera tellement bien qu’il se fera même des amis parmi cette communauté de méchants dégénérés. Et tout cela sans se forcer, on serait tenté d’ajouter…

N’oublions pas que Tsui Hark est non seulement hongkongais, mais il a aussi et surtout fait ses études aux États-Unis, comme le personnage qui nous conte cette histoire et qu’on aperçoit au début et à la fin du film. Voilà le vrai sujet du film : il s’agit d’une ode aux histoires et non à l’Histoire. Pour Tsui Hark, comme pour ce jeune étudiant vivant aux USA et retournant dans son pays, l’important est de perpétuer les légendes qu’on nous a racontées et de les faire vivre.

La fin, absolument géniale à l’aune de ces éléments clés pour l’interpréter, ne nous dit rien d’autre que cela : on voit 2 fins, l’une « réelle » et l’autre imaginée par le personnage (qui pourrait très bien être Tsui Hark). La fin imaginée est d’ailleurs la quintessence du cinéma de Tsui Hark : folle, énergique, irréaliste, technique, drôle et virevoltante.

17
Note globale
Noodles

Fan de cinéma depuis longtemps, je partage mes opinions avec vous. N'hésitez pas à me donner votre avis sur mes critiques. Sur Twitter je suis Noodles, celui qui tombe systématiquement dans le piège des débats relous.

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