Durant le week-end dernier j’ai pu me rendre au festival de Gérardmer pendant un peu plus de trois jours et j’avoue que, malgré un jury qui laissait à désirer, cette première excursion fut très convaincante :la neige, le lac gelé, la raclette, le cadre magnifique… Mais que valait vraiment la sélection 2017 ? Nous avons eu le droit à pas mal de premiers films, souvent réalisés par des européens à la passion très communicative en ce qui concerne le genre.Je vais donc revenir sur les nombreux films que j’ai pu voir tout long de ce week-end intense dans l’ordre dans lequel je les ai vus.
Jeeg Robot (Gabriele Mainetti, sortie le 12 Avril 2017) :
Compétition, Prix du Jury ex-aequo.
Alors que l’on n’avait plus eu de bons films de super héros depuis 2011 (X-Men : First Class), ce film Italien se révèle être une très bonne surprise. Adapté d’un manga japonais dans la veine de Goldorak, tout était là pour que le film soit un petit nanar, pourtant, il arrive à gérer son petit budget grâce à une mise en scène maligne et très référencée mais jamais cheap. Le manga original existe dans la diégèse du film et sert la narration de façon intéressante, ce qui évite l’adaptation anti-cinématographique que je craignais. Gabriele Mainetti oscille parfaitement entre le film de super-héros et le film de gangster en utilisant intelligemment des figures connues pour un résultat très personnel et franchement original.
L’enfer des zombies (Lucio Fulci, 1979) :
Hors compétition.
Si le cinéma bis Italien des 70’s était rempli de bons scénariste, ça se saurait, du coup cette fausse suite au chef d’oeuvre de Romero est totalement symptomatique du genre. Le scénario est confus au possible à toujours chercher le compliqué quand le film aurait pu être un simple petit survival sur une île, mais non ici on préfère multiplier les scènes improbables et les sous-intrigues inutiles. Le casting est incroyablement creux (quand il n’est pas insupportable) et la post-synchro italienne n’y change pas grand chose. Reste qu’on est face à un bon réal : Fulci se plaît vraiment à filmer les scènes gore les plus improbables (le combat entre un zombie et un requin est anthologique) et ce plaisir est très communicatif. Et puis, faut dire qu’il s’y prend vraiment bien derrière une caméra, ce qui permet au film d’éviter de justesse l’appellation “Nanar”, se révélant être un petit bis très plaisant.
Sam was here (Christophe Deroo, Sortie française inconnue) :
Hors compétition.
Tourné en quelques jours aux states, co-production franco-américaine (le réal et les deux producteurs sont des jeunes français), ce survival aux relents de Twilight Zone a vite fait de nous convaincre. Sa courte durée peu rebuter mais en réalité le film est très bien construit et surtout très efficace grâce à une gestion rythmique sans failles. Christophe Deroo révèle un vrai talent pour filmer l’action et ces paysages désertiques, sublimés par une magnifique photo. L’ambiance et la bizarrerie constante rendent l’intrigue plutôt surprenante pour un genre aussi balisé que le survival.
Realive (Mateo Gil, Sortie française inconnue) :
Compétition.
Le seul film décevant que j’ai vu de la compet’. Pourtant rien n’est foncièrement mauvais dedans : la mise en scène se tient, c’est plutôt bien écrit (malgré une voix off mal exploitée et des flashs black pas toujours utiles et qui nuisent au récit), les acteurs sont convaincant (Charlotte Le Bon a beaucoup de potentiel). Mais voilà c’est pas passé… J’ai trouvé ça beaucoup trop froid pour un mélo et pas si intéressant en terme de production design pour de la SF. Le film ne m’a jamais touché et il est clairement trop long pour ce qu’il raconte.
The autopsy of Jane Doe (André Øvredal, Sortie française inconnue) :
Compétition, prix du jury jeune.
Pour l’instant je n’ai parlé que de (très) bons films mais aucun ne m’a mis une claque autant que Jane Doe (NB : D’autres claques sont à venir), j’ai pris un pied fou devant le film, tout en étant totalement terrifié. André Øvredal sait parfaitement utiliser tous les aspects cinématographique pour créer la peur : la mise en scène joue beaucoup sur les détails et utilise le cadre et le hors-champ avec brio. L’écriture est très efficace et on s’attache vite aux personnages. Le film n’est vraiment pas qu’un high-concept, il se tient tout le long et se révèle très jusqu’au-boutiste.
Clown (Jon Watts, Sortie française inconnue) :
Compétition.
Produit par Eli Roth, ce film avait tout pour être le nanar qui ferait tâche dans cette sélection jusqu’ici excellente. Eh bien quelle ne fut pas ma surprise quand le film a commencé. En réalité Clown c’est juste une petite série B de body-horror très honnêtement fabriquée qui, sans atteindre des sommets, va jusqu’au bout de ses modestes intentions. Jon Watts a vraiment fait un bon travail de réal, boostant son film avec des petites idées de mise en scène très efficaces. Même si le film contient des scènes d’horreur (excellent travail sur les FX, notamment à la fin), il baigne dans une ironie très agréable et jamais condescendante. Je vais quand même nuancer mon propos en relevant le fait que cette séance était plaisante principalement grâce au contexte du festival, pas sur que le plaisir soit le même tout seul chez soit devant une télé.
The girl with all the gifts (Colm McCarthy, Sortie française inconnue) :
Compétition, Meilleur musique originale & Prix du public.
La deuxième grosse claque du festival : un survival post-apo dont l’univers rappelle celui de The last of us. La mise en scène est tout bonnement incroyable, rendant le film tantôt très émouvant, tantôt ultra prenant (l’exposition est rudement efficace de ce point de vue). C’est très solide d’un point de vue narratif et le film ne s’essouffle jamais, même s’il prend le temps de nous laisser respirer. Le casting est parfait et je ne peux vous dire qu’une chose : foncez (de préférence en en sachant le moins possible sur le film).
Le secret de la chambre noire (Kiyoshi Kurosawa, Sortie le 8 Mars 2017) :
Hors compétition.
Cette année, le festival rendait hommage à Kiyoshi Kurosawa (Aucun lien, fils unique) et projetait donc son prochain film. Mais après une présentation en grandes pompes par Jean-François Rauger et Kurosawa lui-même, la chute fut rude. En effet, on comprend très vite qu’on est pas là pour voir un vrai film de fantômes mais un drame français poussé dans ses travers les plus éculés. Tout est filmé avec une banalité affligeante, les acteurs sont piètrement dirigés et l’utilisation de la figure des fantômes est très bancale. Sans parler de cette interminable deuxième partie. A éviter.
Grave (Julia Ducourneau, Sortie le 15 Mars 2017) :
Compétition. Grand prix & Prix de la critique.
Boum ! Quel choc ! Le film faisait déjà le buzz en festival depuis quelques mois donc j’y allais très confiant, mais jamais je me serai attendu à une telle leçon. Je pense que Ducourneau a trouvé le meilleur moyen de créer une brèche pour faire du cinéma du genre grand public en France. En effet, en prenant comme base le drame adolescent pour lui insuffler par la suite des éléments hardcore, elle parvient à rendre son film plus accessible contrairement à des trips ultra-violent comme “Calvaire” (que j’adore pourtant). Sa mise en scène est très personnelle et les quelques références sont très discrètes. Il ne s’agit jamais de faire de la surenchère et le film se révèle très touchant (Garance Marillier transporte son personnage dans la stratosphère). Et puis entendre Julie Gayet (la productrice) dédicacer son film à l’équipe de Starfix en se définissant comme une fan de genre, ça met du baume au cœur.
Viral (Henry Joost & Ariel Schulman, Sortie le 1er Mars) :
Hors compétition.
Faisons simple : j’emmerde Blumhouse.
C’est sans doutes une de leurs pires productions (c’est dire si c’est mauvais). Chiant comme la pluie, bourré de cliché, aucune inventivité et d’un opportunisme gerbant (Machine Gun Kelly encore plus mauvais acteur que rappeur).
Du beau papier peint pour catalogue Netflix.