Comme un avion est un film réalisé par Bruno Podalydès qui joue pour la première fois le rôle principal et Sandrine Kiberlain, Agnès Jaoui, Denis Podalydès et Pierre Arditi, dans un caméo plutôt énorme et inattendu… Critique.
Synopsis :
Michel (Bruno Podalydès), infographiste, est un quinquagénaire féru d’aviation. Admirateur de l’Aéropostale, il rêve chaque jour de s’envoler à bord d’un de ces engins formidables. Mais lorsqu’il découvre des photos de kayaks, il est tout de suite séduit par les lignes souples de ces canots qui lui rappellent le fuselage d’un avion. Après avoir acquis un kayak et s’être entraîné sur le toit de sa maison, il reçoit l’approbation de sa femme pour entreprendre une virée en solitaire sur une rivière inconnue. Au cours de son périple qui rompt totalement avec son quotidien et l’entraîne loin de chez lui, Michel multiplie bientôt les rencontres le long de la rive…
Un héros burlesque à la française
On a toujours suivi avec sympathie et une certaine patience compréhensive les personnages masculins créés par Bruno Podalydès, sortes de gentils rêveurs imparfaits mues par un idéal virant parfois à l’obsession.
Depuis Versailles Rive-Gauche, un moyen métrage où on découvre ce personnage improbable préférant inventer tout un stratagème pour ne pas révéler à la fille qu’il reçoit qu’il est allé aux toilettes avant qu’elle n’arrive, en passant par Dieu seul me voit (1998), dans lequel un trentenaire hésite constamment entre trois femmes, puis le génial Liberté-Oléron (2001), où son personnage (toujours joué par son frère l’acteur Denis Podalydès) devenu père voit son rêve de devenir un grand navigateur (déjà !) être bousculé par la triste réalité : il ne sait rien de la mer et encore moins de l’océan ! Et plus récemment, ce pharmacien qui rêve d’une autre vie (Adieu Berthe, 2012)…. Si l’on excepte la parenthèse des films tirés de l’oeuvre de Gaston Leroux, tous ces héros rêvant leur vie ne sont en fait qu’un seul et même personnage qui ressemblent fortement à Bruno Podalydès. Il était donc temps que ce dernier franchisse le cap de l’auto-fiction et accepte de jouer lui-même ce portrait-robot de ce que l’on pourrait qualifier de héros burlesque à la française.

Ulysse et la crise de la cinquantaine
Il est une nouvelle fois question de crise existentielle dans ce film de Bruno Podalydès. Mais, cette fois-ci notre héros, plus proche de la personnalité d’Alain Chabat que de celle de Jean-Paul Belmondo (pour faire court), va s’écouter et se lancer bille en tête dans l’aventure. Ni une ni deux, il achète sur un site de e-commerce un kayak – ainsi qu’une panoplie complète de l’aventurier amateur – et prend quelques jours de RTT pour naviguer sur une rivière en banlieue parisienne. Cela nous donnera quelques perles burlesques. Comme lorsqu’il se trompe de chemin et, alors qu’on le pensait loin de toute civilisation, il se retrouve coincé dans un minuscule canal, son kayak envasé dans un chemin longeant un centre commercial de banlieue…
Son odyssée, sa quête de sens, il la trouvera finalement dans une auberge étonnante où il accoste pour dormir la première nuit venue. Finalement, il s’y plaira bien dans cette auberge : la tenancière est plutôt sympathique et avenante (Agnès Jaoui excellente) et les autochtones y sont très accueillants (il faut dire qu’on y consomme beaucoup d’absinthe !). Même lorsqu’il finit enfin par quitter les lieux, il se retrouve comme aimanté par celui-ci et ce n’est pas pour déplaire à notre apprenti des chemins de traverses.
Sa Pénélope (Sandrine Kiberlain qui est officiellement devenue la meilleure actrice française de son époque et de loin…) semble très compréhensive et patiente, comme nous spectateurs, charmés par la maladresse et la bienveillante envie de vivre de notre Ulysse du quotidien (Bruno Podalydès, exceptionnel dans son propre rôle…).
La musique, autant que le jeu des acteurs, tient une place importante dans la réussite de ce film puisque c’est par elle que point une forme de mélancolie nous rappelant que, comme toute belle aventure de vacances, tout à une fin et, alors, il est temps de passer à autre chose. Les voix de Bashung (Vénus) et de Moustaki (Donne du rhum à ton homme, Le Temps de vivre) résonneront longtemps dans nos têtes en souvenir de ce film charmant et profond comme une ode aux chemins de traverse.
Vous l’aurez compris, je vous invite à courir aller voir cette fable aussi profonde sur le fond que modeste sur la forme, qui nous change des pensums que nous réservent parfois les auteurs traitant de ce sujet délicat qu’est la crise existentielle.
J’avais déjà envie de voir ce film et cette critique me donne encore plus envie d’y aller. Les acteurs, une jolie histoire, la musique, tout ce que je recherche en allant au cinéma…
Merci Babouk ! Oui c’est un très bon film tout spécialement pour l’été !
J’ai bien aimé aussi! Un chouette « feel good movie » comme ça se dit maintenant.
ALERTE (petit) SPOIL
Par contre j’aurais pas vu Sandrine Kimberlain en Pénélope, réputée pour sa vertu en l’absence de son homme…
D’ailleurs cet Ulysse (j’ai beaucoup pensé à Chabat également) désire-t-il vraiment rentrer chez lui? Le fera-t-il? Le veut-elle elle-même? J’ai l’impression que le dernier plan, laisse entrevoir des vies parallèles, l’un sur terre, l’autre sur l’eau…
C’est en tout cas un film où il n’y a pas de blanc ou de noir, que des nuances de gris qui méritent, celles-là, qu’on s’y attarde!
Bonjour Delphp,
En effet, je suis d’accord avec toi Sandrine Kiberlain n’est pas Pénélope dans le sens où elle n’attend pas sagement son homme… Mais elle a décidé de le laisser faire son trip donc il y a tout de même ce côté femme qui attend son homme au port.
Je suis aussi d’accord sur la fin qui laisse certaines questions en suspend c’est pour cela que je parle de mélancolie et de crise existentielle.
Merci pour ton avis très intéressant et subtile.