American Sniper est le 34ème long-métrage de Clint Eastwood. Première polémique de l’année, premier coup de gueule de Doc Ciné. Critique.
L’histoire en bref
Beaucoup de choses ont été dites sur ce film, de nombreuses louanges mais aussi beaucoup de critiques violentes. À mon sens, ce film ne mérite pas tout ce tapage qu’il soit positif ou négatif. Revenons sur l’histoire du film, point objectif, avant d’analyser le film.
American Sniper raconte l’histoire de Chris Kyle, génial Bradley Cooper qui s’est investi dans ce film (il est producteur) et cela se ressent, le plus redoutable de l’histoire militaire américaine. On fait mieux comme héros, mais il faut croire que chaque époque a les héros qu’elle mérite…
Tireur d’élite des Navy SEAL, Chris Kyle est envoyé en Irak dans un seul but : protéger les soldats en première ligne. Sa précision chirurgicale sauve d’innombrables vies humaines sur le champ de bataille et, tandis que les récits de ses exploits se multiplient, il décroche le surnom de « La Légende ». Cependant, sa réputation se propage au-delà des lignes ennemies, si bien que sa tête est mise à prix. Il devient une cible privilégiée des insurgés.
Parallèlement, il doit mener un autre combat, mais sur le plan personnel cette fois : tâcher, coûte que coûte, d’être un mari aimant et un bon père à des milliers de kilomètres de distance. Malgré le danger, et l’angoisse dans laquelle vit sa famille, Chris participe à quatre batailles décisives parmi les plus terribles de la guerre en Irak, s’imposant ainsi comme l’incarnation vivante de la devise des SEAL : « Pas de quartier ! » Mais lorsqu’il retrouve sa femme Taya Renae Kyle (méconnaissable Sienna Miller, qui décidément après Foxcatcher n’a de cesse de nous surprendre) et ses enfants, Chris prend conscience que la guerre continue de le hanter.
John Ford, Sudiste & Redneck
Après ce résumé, qui je vous assure, est le reflet exacte de ce que l’on voit à l’écran, on peut se demander où on est. Pendant un court instant, j’ai eu un flash et je me suis cru dans ma chambre d’adolescent en train de regardé un téléfilm sur M6, vous savez ces téléfilms de la honte qui « étaient tirés d’une histoire vraie » que l’on regardait parfois quand on ne savait pas trop quoi faire un après-midi, coincé chez nous à cause d’une mauvaise grippe. Bref, le film qui tue. Le film qui énerve les érudits, les militants ou les simples personnes ayant une conscience politique de gauche, les WASP, les bobos, les bienpensants, les bonnes gens, enfin à peu près tout le monde sauf les bellicistes et les sudistes américains.
Mais soyons fair-play, Clint Eastwood est un grand cinéaste et un grand acteur que j’admire profondément, malgré ses quelques dérapages nationalistes et, finalement, qui sont dû à son éducation et ses valeurs sudistes, qui sont tout à fait respectables car dénuées de racisme et de bellicisme. Clint Eastwood est un grand penseur humaniste (oui, j’ai bien dit humaniste !) et c’est uniquement pour rendre hommage (pay tribute comme ils disent) à ce grand homme que je vais critiquer ce film. En hommage au réalisateur de Impitoyable, dans lequel Clint joue lui-même un tueur repenti dont les démons refont surface, symbole d’une Amérique tiraillée par sa violence intrinsèque. Eastwood est le fruit de cette Amérique, il est sudiste, conservateur, aime les armes, non pas pour tuer, mais pour se défendre (croit-il). Il est aussi stupide de critiquer cet état de fait que de critiquer un réalisateur iranien montrant des femmes voilées car il ne serait pas féministe. Le cinéma est un merveilleux art universel et c’est pour cela qu’on l’aime. Il nous permet de partager et de comprendre un court moment des cultures différentes, mais tout aussi respectables, alors tâchons de nous en souvenir.
Eastwood est-il pour la Guerre en Irak ? Sans doute que oui, comme 90% des Américains. Est-il raciste ? Bien sûr que non, son parcours, ses films en témoignent. Dans Gran Torino, son film qui pourrait le plus porter à confusion, il dénonce au contraire les amalgames et les préjugés en les montrant : il n’y a pas les bons et les méchants, tout est une question de background et de circonstances. Enfin, en ce qui concerne son amour des armes, le personnage principal de Gran Torino, faut-il le rappeler, préfère mimer symboliquement le fait de dégainer son arme plutôt que de tirer à balles réelles. Ici encore Clint Eastwood décrit la dénonciation d’une Amérique armée jusqu’aux dents plutôt que la vengeance bête et méchante.
Pour commencer, j’aimerais insister sur quelques points positifs d’American Sniper, qui expliqueront sa note au regard de toutes les critiques négatives qui vont suivre. Le film est extrêmement bien filmé. Les scènes de guerre, surtout celle se déroulant pendant une tempête de sable, sont incroyables de virtuosité.
Autre dispositif de mise en scène passionnant, la manière dont les transitions entre les scènes en Irak et la vie quotidienne en Amérique sont gérées. Clint Eastwood a réussi à troubler le spectateur et à rendre palpable cette sensation de perte de repère en ne proposant pas ou peu de scènes de transition entre les deux mondes : un moment Chris est en Irak et l’instant d’après il est chez lui ou dans un bar aux USA. Très réussi.

Un vieil homme un peu fatigué
Cette mise au point faite, que faut-il penser d’American Sniper ? Et bien, malheureusement, rien de bon… Eastwood n’est pas responsable ni de l’histoire ni du scénario, d’autres se sont d’ailleurs battus pour tourner le film (Steven Spielberg en tête). Alors qu’est-ce que je lui reproche ? C’est simple, un manque presque fascinant d’empathie pour ses personnages, hormis celui de Chris, dont on comprend, grâce à une incise sur son enfance, les causes de son engagement militaire. Les soldats combattent car ils veulent défendre leur pays, point barre. Le cinéma de genre, et en particulier le cinéma de guerre, regorge de personnages un peu bas du front, c’est même la norme, mais en général, le réalisateur contrebalance ce point de vue par un discours, un positionnement. Ici, rien de cela, on est plongé dans la psyché très limitée du « héros » du début à la fin du film, malgré la présence salvatrice de sa femme (seule pointe d’humanité dans tout ce marasme).
Si on compare ce film avec les meilleurs films de guerre américains (on parle de Clint Eastwood, là, on ne va pas comparer ses films avec la première bouse venue), American Sniper ne tient pas la comparaison ne serait-ce qu’une seconde. Je m’explique. Prenons Voyage au bout de l’enfer de Michael Cimino (lui aussi un peu fatigué d’après ce qu’on a pu voir quand il est venu nous rendre visite à Lyon pour le Festival Lumière), qui est une critique acerbe de la guerre et de la Guerre du Vietnam en particulier, on le sait tous. La réussite de ce film réside surtout dans les longues et subtiles descriptions des enjeux sociaux et psychologiques autour de la guerre. La guerre est un moment hors du temps où des êtres, que parfois tout sépare, sont forcés de vivre ensemble dans des conditions extrêmes. Dans ces moments, tout refait surface dans des lieux où règnent l’interdit et les non-dits : les antagonismes sociaux, les doutes, les peurs enfouies. Le film de guerre est donc, en général, un sujet en or qui permet aux cinéastes talentueux de s’exprimer. Dans le cas d’American Sniper, il n’en est rien : pas de discours, pas de volonté d’expliquer, pas ou si peu de recherche psychologique, Clint Eastwood s’est contenté de coller à l’hagiographie qui a servi à pondre le scénario. Et c’est bien dommage…
Qualités :
Bataille finale / Bradley Cooper / Quelques idées de mise en scène
Défauts :
Discours belliciste / Aucune place faite aux Irakiens / Aucun discours critique sur la guerre / Personnages peu sympathiques
“Ce projet me tenait particulièrement à cœur car il se situait à mi-chemin entre les exploits de Chris au combat et les aspects personnels de sa vie, qui le rendent encore plus intéressant. Cela montre le poids de la guerre non seulement pour un individu, mais aussi pour toute sa famille. Il est bon de se rappeler ce qui est en jeu lorsque les gens sont envoyés au combat et de reconnaître les sacrifices qu’ils consentent : j’ai donc pensé qu’il était extrêmement important de raconter cette histoire.”
Clint Eastwood
Un film problématique
Le patriotisme d’American Sniper ne me pose pas de problème. Comme je le disais précédemment, le nationalisme est un trait de caractère du réalisateur et il n’est pas belliciste. Je ne vois pas le mal à mettre des drapeaux américains sur l’affiche ou dans plusieurs plans du film. Ce n’est pas ma tasse de thé, mais chacun ses goûts et, à ce niveau là, cela n’a jamais fait de mal à personne.
Par contre, je suis beaucoup plus dérangé par le fait que le réalisateur n’accorde aucune place aux Irakiens alors que la moitié du film se passe en Irak. Il y a bien des scènes avec des Irakiens, mais ceux-ci sont cantonnés à des rôles de victimes ou de bourreaux. Ainsi, pour le réalisateur, l’Irak est une cour des miracles où se côtoient des enfants et des femmes, forcément victimes (voire même utilisés comme chair à canon), des hommes dépassés qui demandent apeurés de l’aide aux Américains et des terroristes, vaguement bouchers, barbares, tortionnaires….
Le comble du comble est atteint quand Clint Eastwood ajoute à l’histoire (je pense que c’est un ajout de sa part pour faire plus hollywoodien), une espèce de super sniper terroriste habillé en noir. Je suis surpris que aucun critique n’ait relevé, à ma connaissance, ce batman en djellaba qui s’accoutre d’un turban noir avant de sortir de son appartement pour tuer à tour de bras des Américains. Ridicule, risible et très dérangeant (regardez, jugez, c’est l’image que j’ai choisie en tête de chapitre).
Enfin, et le pire de tout, je crois que notre bon Clint Eastwood a loupé de manière très gênante la fin du film en refusant de filmer l’assassinat du héros, Chris Kyle. Ce dénie de réalité tend à mythifier une personnalité plus trouble qu’il n’y paraît. Il aurait pu réussir un film tout à fait intéressant en analysant les destins croisés de ces deux personnes : ce soldat légendaire ayant tué 200 personnes et cet autre soldat revenu fou, antihéros gênant que l’Amérique refuse de voir. Il n’en fera rien : Eastwood a fait son choix, il préférera se cantonner au cahier des charges et immortaliser le destin pseudo-héroïque de cet homme dont le seul fait d’arme est d’avoir tué plus de personnes que les autres. En effet, on ne peut s’empêcher de penser que Clint Eastwood tente de canoniser de façon artificielle un soldat qui n’en demeure pas moins un sniper, soit ce qui représente à mes yeux le pire dans la guerre moderne. On ne choisit pas ses héros, disent-ils…
Rien que ta dernière phrase prouve a quel point tu ai dans une ignorance totale envers la guerre moderne ce qui explique surement le fait que tu n’aime pas le film. Certe le film nous montre que une fois de plus les américains sont les gentils et les irakien les vilains mais le film ne traite pas spécialement de cela pour moi, eastwood souhaite démontré au ignares comme toi que les snipers ont beau être en retrait du combat cela n’empêche pas que leur rôle est d’une importance capitale dans une bataille car leurs précision permet souvent en une cartouche de sauvé des vies et malgré leur éloignement ils peuvent voir la tête de leur victime contrairement a un soldat qui ne tire que sur une silhouette la plupart du temps.
Ensuite tu dit en gros que Kyle manque totalement de sentiments dans le film. FAUX, exemple la scène de l’enfant et du lance roquette si il avait été dénué de sentiment il aurai appuyé sur la gâchette au moment ou le garçon aurais pris le RPG.
médite la dessus et révise ta critique.
Écoutez, j’ai déjà répondu à ce genre de commentaire sur Facebook, mais je veux bien recommencer. Moi qui croyais avoir été soft dans ma critique !
J’assume totalement ma dernière phrase : naguère, et je ne parle pas d’il y a 10 ans, on ne considérait pas les snipers comme des héros. Mais comme je dis dans ma dernière phrase à chaque époque ses héros…
Je ne dis pas que les snipers n’ont pas une importance primordiale dans la guerre, là n’est pas la question. Eastwood se demande dans ce film qu’est-ce qui fait un héros. Le personnage principal le répète à plusieurs reprises d’ailleurs, il ne se considère pas comme un héros.
Tu dis que les snipers permettent en une cartouche de « sauver des vies », te rends-tu compte de ce que tu dis ? Une cartouche…sauver des vies ?
Je ne critique pas les snipers, il en faut. Ni la guerre d’ailleurs, mais c’est le discours sur l’héroïsme de ces gens que je critique. Même Eastwood le fait d’ailleurs.
Enfin, je n’ai jamais dit que Kyle n’avait pas de sentiments, je précise que c’est un être humain et je considère qu’on a tous des sentiments. Mon propos est de dire qu’il ne verbalise pas ses sentiments et qu’il refuse d’intellectualiser ce qui lui arrive, ce qui me fait dire qu’il est un peu bas du front. Là, j’avoue ne pas être très ouvert ou avoir des préjugés mais bon personne n’est parfait.
Ton anecdote sur l’enfant n’est pas très pertinente car si l’enfant avait essayé de tirer, il l’aurait abattu de sang froid. Mais rassure toi, je sais que la guerre n’est pas un jeu et qu’il ne fait que son métier. Perso, je préfère ne pas donner de leçon et ne pas ériger en héros tout le monde.
Alors non je ne réviserai pas ma critique, car j’ai bien réfléchi avant de l’écrire. Par contre, toi, tu as le droit de ne pas être d’accord avec moi et c’est très bien. 😉
Il y aurait une grave confusion dans ce film: le peuple irakien défendait son pays d’une présence coloniale sur son sol, les combattants ,y compris les femmes et enfants se sacrifiaient pour leur patrie : ils n’avaient rien à voir avec les terroristes du djihad islamiste visant à ériger un califat moyenâgeux. Les USA ont envahi l’IRAK pour liquider le régime du dictateur Sadam Hussein sous prétexte de mettre un terme à sa menace brandie des armes de destruction massives planant sur la civilisation occidentale : résultat des courses les machinations sournoises des ennemis de la paix ont fini par susciter un foyer permanent de conflits au moyen orient- avec l’émergence de l’entité artificielle terroriste Da’ech », le brasier syrien sans évoquer la question centrale du problème palestinien toujours non résolu ;etc,etc; Le film American Sniper prétend défendre la patrie américaine contre les terroristes d’El Qaida et consorts . Autrement dit c’est « le peuple irakien terroriste avec ses femmes et enfants qui a envahi l’Amérique et qu’il faut liquider tirer sur lui à bout portant comme dans les bons vieux films westerns de Clint la gâchette. Le reste importe peu . A quand des films intelligents qui montrent les grandes connivences du terrorisme international avec les narco-trafiquants et les pétrodollars en passant par les manipulations des stratèges du machiavélique amalgame mettant dans le même sac musulmans pacifistes , musulmans patriotes défendant leur partie et terroristes islamistes qui ne représentent que leurs sectes -partis fascistes et organismes exclusifs sectaires? En définitive, chacun a le droit d’être d’accord ou pas d’accord sur tels et tels points ou trame générale du film mais quand de l’Histoire , je considère honnêtement , en tant que citoyen du monde , qu’il y a lieu d’éviter la vision tendant à dramatiser et banaliser les faits authentiques historiques pour ne pas avoir à les restituer sous forme de thriller , l’intérêt du contenu du film perdant tout son sens de départ maladroitement évacué au finish …par souci de le céder au péché mignon de l’exaltation de l’exclusif Bon américain agressé chez soi par la brute arabo-musulmane irakienne ,syrienne, palestinienne et autre afghane , iranienne , Hizbollah libanaise,etc,etc. et le truand de la nébuleuse internationale terroriste islamistes que les « Bons » cherchent à accoler éternellement à la population mondiale de plus de un milliard de musulmans! Le dangereux amalgame semble avide du déclenchement d’une troisième guerre mondiale,dirait-on alors qu’en filigrane…elle a éclaté déjà avec ce cancer terroriste planétaire qu’il convient de combattre efficacement en joignant les efforts de tous les forces démocratiques pluralistes citoyennes à travers le globe. Pas en accroissant les déceptions chez les déshérités en défigurant leur identités , les humiliant et faisant par conséquent le lit des partisans de la violence terroriste par ces témoignages irresponsables de scènes choquantes de racisme et traitement de « terroristes » de simples gens défendant leur patrie envahie alors que les criminels « terros » sont ailleurs ,bel et bien ailleurs comme l’a donné à voir la suite de l’histoire sur le grand mensonge des armements irakiens de destruction massive. Bref, le fin fond des choses dans tout ceci,pour faire court, consiste en le règlement de la question palestinienne: ce jour là , l’herbe sera coupée sous les pieds des islamistes qui ne trouveraient plus de prétexte idéologique et doctrinal pour justifier leur raison d’être auprès de qui ou quoi que ce soit! La civilisation planétaire humaine pourrait alors s’ouvrir sur les nouvelles priorités qui s’annoncent telles que l’élection d’un Parlement Onusien universel représentatif des peuples de l’Humanité,etc…