Je déclamais tout récemment qu’à mes yeux, le cinéma british actuel (entendons par là Irlande et Royaume-Uni) était le nouveau cinéma américain. Qui que quoi comment ? Explication !
Le cinéma british et le tournant Harry Potter
Avant, le cinéma anglais, c’était surtout des films sur l’époque Thatcher, des gens mal barrés dans la vie qui s’en sortaient en s’accrochant à ce qui peuvent sur fond de ciel gris et des films en costumes de l’époque victorienne. Puis le cinéma anglais c’était aussi des acteurs avec une gueule plutôt qu’un minois comme Robert Carlyle (The Full Monty, la série Once upon a time), Steve Coogan (The Trip, La Nuit au musée) ou encore Brendan Gleeson (Harry Potter).
Puis il y a eu Harry Potter, justement. Ça n’a l’air de rien comme ça, mais Harry Potter, c’était le début des films à gros budgets avec un gros pourcentage d’anglais, auteure oblige. À ce sujet, Martin Freeman (The Hobbit, la série Fargo) plaisantait sur le fait qu’il était un des 7 acteurs anglais à ne pas avoir tourner dedans.
Ensuite, il y a eu Game of Thrones, la série qu’on ne présente plus et la plus téléchargée de tous les temps. Diffusée sur la chaîne US HBO, GoT pour les intimes ne se fournit qu’en Europe. Pour des raisons économiques d’abord, et grand bien leur en fasse puisqu’elle a permis que Royaume-Uni ne rime plus avec Petit budget. Si elle a permis également de propulser au rang de superstars des acteurs jusqu’alors inconnus, comme Emilia Clarke (Daenerys), Natalie Dormer (Margaery Tyrell) ou Kit « Jon Snow » Harrington, elle a aussi ramener au goût du jour des vieux de la vieille comme Sean « je meurs à chaque fois » Bean, Lena Headey (300) ou encore Stephen Dillane (Le Roi Arthur) et Diana Rigg (la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir). Peter Dinklage triche un peu puisque il est un des rares acteurs américains du casting.

Des acteurs britanniques au top
Dans la grande famille du cinéma, l’argent signifie la popularité. Être anglais devient alors synonyme de vente, et on en a retrouvé un peu partout. De Elementary qui nous a ressorti l’excellent Jonny Lee Miller (Trainspotting), en passant par House M.D. et le non moins fabuleux Hugh Laurie (Stuart Little), ou encore Hannibal et Hugh Dancy (vu dans Oh My God!), les acteurs made in UK sont devenus non seulement visibles mais aussi indispensables. Certes, ils étaient déjà présents tout de même : un Idris Elba par-ci dans The Wire, un Andrew Lincoln par-là dans The Walking Dead. Ils deviennent ce petit plus classieux, ces ambassadeurs du fameux flegme qui leur va si bien. Cette retenue si caractéristique qui laisse entrevoir le pire, dont Rosamund Pike et son rôle dans Gone Girl en est la parfaite représentante.
D’ailleurs, jetons un coup d’œil aux nominés des Oscars 2015. On retrouve dans les catégories Meilleur acteur et Meilleure actrice au moins deux nominé(e)s britanniques. Eddie Redmayne et Benedict Cumberbatch d’un côté, Rosamund Pike et Felicity Jones de l’autre. Et qui a tout raflé aux dernières cérémonies dans la catégorie meilleur acteur ? Eddie Redmayne, acteur londonien de 33 ans.
Le Royaume-Uni devient ce pont culturel entre la grosse machine hollywoodienne et le cinéma intimiste européen.

Des équipes artistiques et techniques omniprésentes
Au passage, Hollywood n’hésite plus à faire appel à l’Europe pour réaliser leurs effets spéciaux. Gravity, Interstellar, Les Gardiens de la Galaxie : tout est sous-traité en Europe via les studios londoniens de Framestore. L’Angleterre, nouveau vivier pour une main d’oeuvre à bas prix ? Pas seulement.
Prenez Doctor Who par exemple. Plus vieille série TV de l’histoire des séries TV, un financement 100% UK et inscrite au Guiness Book des records en audience pour l’épisode des 50 ans du 23 novembre 2013, diffusé simultanément dans 94 pays. Ça en fait du monde et des spectacteurs potentiels. Il aura fallu deux ou trois ans max pour qu’ Hollywood flaire la bonne affaire. Ryan Gosling récupère alors Matt Smith (11ème Docteur) pour son premier film, et Marvel, David Tennant (10ème Docteur et de loin le plus populaire auprès des fans) pour sa nouvelle série Netflix AKA Jessica Jones. Steven Moffat, scénariste de la série et génie de la science fiction nouvelle génération, est débauché par Spielberg pour réécrire ses Tintin. Voilà comment on récupère des millions de fans dans l’ombre pour les faire passer du petit au grand écran. Puis comme si ça ne suffisait pas, le duo Steven Moffat/ Mark Gatiss est à l’origine du renouveau de Sherlock, avec Benedict Cumberbatch et Martin Freeman. Le passage d’un bon nombre d’oeuvres de Sir Conan Doyle passées dans le domaine public a également été un tournant côté production puisqu’elles servent sur un plateau la franchise qu’on attendait tant (et le renflouement du compte en banque de Guy Ritchie au passage).
Il n’y a pas que Doctor Who côté télévision. Les séries britanniques font les choux gras de la télévision américaine. Réputées pour leur qualité créative, elles sont les dernières à offrir des scénarii originaux, quasiment instantanément récupérés par les Etats-Unis, comme ce fût le cas pour Shameless, The Office, Life on Mars, et Broadchurch (rebaptisé Gracepoint avec toujours David Tennant dans le rôle principal). Certaines sont des OVNIS inadaptables et subversives comme l’excellente Black Mirror, car oui, la série britannique fait rarement dans le politiquement correct.

Il est clair que les séries et films britanniques n’ont plus rien à envier à leurs homologues américains. Dernier exemple en date : Kingsman de Matthew Vaughn. Grosses bastons, gros effets, grands acteurs. Matthew Vaughn, c’est aussi le réalisateur et créateur du premier Kick-Ass, et de X-men – Origines dans lequel 70% du casting est britannique. Et ouais !
D’ailleurs, au jeu de « Qui est anglais ? », vous verrez qu’il y en a plus que vous ne le pensez. En commençant par Ridley Scott, déjà. Puis qui est le responsable des derniers succès des années précédentes ? Christopher Nolan ! Anglais ! Kenneth Branagh, d’abord promu adaptateur en chef de Shakespeare, ne s’est il pas retrouvé à réaliser le premier Thor et le prochain Cendrillon ? Steve McQueen et son Twelve years a slave n’a-t-il pas raflé tous les oscars en 2014 ? Je vous le dis, ils sont partout ! Hollywood a bien compris qu’il ne suffit plus de compter sur les anciennes valeurs sûres à base de Brad, de Johnny, de Tom. Non. Désormais Hollywood mise tout sur le Twinings.
Lentement mais sûrement, la relève des nouveaux réalisateurs amènent du sang neuf et du film culte. Qui n’a jamais vu un film issu de la trilogie du Cornetto (Shaun of the dead//Hot Fuzz//The World’s End)d’Edgar Wright ? Ce petit génie de l’humour est à l’origine d’un des meilleurs films de geek, j’ai nommé Scott Pilgrim vs The World. À ce sujet, retrouvez l’article sur le génie visuel et comique d’Edgar Wright sur Doc Ciné.

Là où Hollywood se perd en préquelles, suites et adaptations, là où les scénaristes arrivent au bout du rouleau de l’inspiration, le Royaume-Uni amène un point de vue différent, novateur et o-ri-gi-nal. A la question de Doc Ciné : les franchises et les films de super-héros vont-ils tuer le cinéma ? Je réponds : NON ! Car pataugeant dans sa bouillasse du vu et revu et emprisonnée dans un cercle vicieux qui prend le spectacteur pour un idiot du village, Hollywood commence à entrevoir une porte de sortie outre-Atlantique.
Désormais, il est évident que le cinéma anglais, ses ambassadeurs et ambassadrices, sont là pour rester et faire partie du paysage, non plus comme des seconds rôles et des éléments « so fresh » de comédies américaines, mais bien comme des acteurs, des réalisateurs et des scénaristes bankables sur qui peuvent se monter des films entiers, rameutant aussi bien un public « chauvin » européen que le public souverain américain et ses quelques 370 millions d’entrées annuelles. Et si il y a bien un peuple qui ne se laisse pas pervertir par les sirènes du dollar, c’est bien les Anglais.
Ne boudez pas cependant les films français, qui, eux aussi, commencent tout doucement à sortir de leur carcan estampillé « Nouvelle vague » et challenge émotionnel autour d’un verre de vin rouge.
Mais ça, ça sera dans un autre article, si vous êtes sages…
Quelques films pour approfondir l’article et vous faire partager mon amour de la Grande-Bretagne :
- The Commitments d’Alan Parker.
- Beaucoup de bruits pour rien de Kenneth Branagh.
- Land and Freedom de Ken Loach.
- Happy-go-lucky de Mike Leigh.
- The Trip de Michael Winterbottom.
Quelques séries :
- Doctor Who
- Black Mirror
- Black Adder
- A bit of Fry and Laurie
- The Monty Python Flying Circus
- Broadchurch
Les acteurs anglais à connaître pour briller en société :
- Sally Hawkins, vue dans Blue Jasmine de Woody Allen.
- Simon Pegg et Nick Frost vus dans la trilogie du Cornetto d’Edgar Wright, Paul de Greg Mottola
- Rosamund Pike vue dans Gone Girl de David Fincher et The World’s end d’Edgar Wright.
- Felicity Jones vue dans Oh My God ! de Tanya Wexler et Like Crazy de Drake Doremus
- Colin Firth vu dans…pfff tellement de films !
- Donmhall Gleeson vu dans Il était temps de Richard Curtis, et bientôt dans Ex Machina d’Alex Garland, l’auteur de La Plage.
- Mark Strong, vu souvent chauve dans Kick Ass de Matthew Vaughn et Rock n Rolla de Guy Ritchie.
- Matthew Goode vu dans The Imitation Game de Morten Tyldum et A Single Man de Tom Ford. (mon chouchou)
- James Mc Avoy vu dans les derniers X-Men (ah non c’est lui mon chouchou).
- Michael Fassbender vu dans Shame de Steve McQueen et Inglourious Basterds de Quentin Tarantino (nan nan nan c’est lui mon chouchou).
Bon, c’est tous mes chouchous.
Il va de soi, qu’un article ne suffit à résumer la richesse de ce nouveau cinéma anglais.
Alors le mieux, c’est qu’on se retrouve au pub.
Très intéressant, en effet les anglais n’ont rien à envier aux américains. Mon chouchou est Dominic West, je l’ai trouvé très bien dans The affair avec Ruth Wilson, ils sont tous les deux britanniques. Envie d’aller faire un tour au pub….
Excellent choix Babouk79, il a joué dans pas mal de bonnes séries aussi. Petite info, il jouera Ernest Hemingway dans un film appelé Genius !
Merci pour l’info Doc !